Vigneronne ! Enfin !

Des potes, y a rien de tel ! J’ai eu la chance d’avoir un réseau de vignerons bio passionnés sur qui l’on peut compter. C’est ainsi que 2 vignerons m’ont proposé de vinifier mes vendanges 2022, ma deuxième saison, dans leur cuvage. Je ne vends donc plus mes raisins mais je les vinifie et je peux ainsi proposer mes premières cuvées de Beaujolais Villages et de Moulin à Vent. Je suis donc passée de viticultrice à vigneronne ! Et j’en suis extrêmement fière 😀

La saison 2022 a été un peu compliqué en terme de gestion de cave. Malgré la courte distance séparant les 2 cuvages, car oui j’ai vinifié chez les 2 vignerons, les aller-retour pour le suivi des vinifications m’ont pris du temps et de l’énergie.

Contrairement à ce que l’on peut penser, les vignerons ne font pas ce qu’ils veulent et n’importe où. Les vignerons doivent déclarés les lieux de vinification à différents organismes donc les douanes. Douanes à qui l’on doit demander une autorisation pour partager un cuvage. Je vous épargne les détails administratifs mais en règle générale cela se passe bien.

Quant à 2023, peut-être pourrais-je vous présenter un nouveau cuvage où je serais seule. je vous tiendrais au courant lorsque le contrat de location sera signé…

Vigneronne ?!

La première question que l’on me pose lorsque j’explique que je suis en reconversion professionnelle, c’est « mais pourquoi le vin » ?. Voilà pourquoi : un métier initial choisi par défaut (je ne savais pas quoi faire après le bac, alors mon père s’est dit « pourquoi pas la comptabilité ? il y aura toujours du travail ! » ; et un jour au bout de nombreuses années je me suis dit « mais qu’est-ce que je fais là ? ». Plus d’envie, je ne trouvais plus de sens à mon ancien job.  J’avais déjà travaillé au sein d’une coopérative viti-vinicole dans le sud du Beaujolais et une opportunité s’est présentée à ce moment là de retourner bosser avec elle. Bosser à la cave, c’était super ! Travailler avec des gens passionnés qui ont les yeux qui brillent en vous parlant de leur job, je n’avais jamais rencontré de telles personnes.  Ce sont eux qui m’ont donné l’envie d’en connaître plus et me voilà embarquée à préparer un BTS viticulture oenologie.

Et le vrai déclic, c’est le stage. Un cycle complet auprès de Philippe. J’ai mis les pieds dans les vignes et….je me suis sentie tellement bien au milieu de la nature, dans ce beau paysage vallonné du Beaujolais 🥰. C’est là que j’ai compris que c’était le métier que je voulais faire. Peu importe que je ne vienne pas du monde viticole et encore moins du monde agricole. Peu importe que je ne connaisse pas tous les vins du monde (voire pas grand chose). Peu importe que je connaisse (pas encore) de vigneron. Peu importe que je n’ai pas (encore) de cuvage. Alors je me suis lancée. Comme le disait Nelson Mandela « Cela semble toujours impossible jusqu’à ce que ce soit fait ».

« Tu es une extra-terrestre », « C’est un métier de con », « C’est super », « T’es courageuse »…

Plein de remarques et d’encouragements qui me font sourire et qui me font chaud au coeur. C’est sûr, même après mon stage auprès de Philippe et mon boulot au lycée viticole, je doute parfois mais j’aime ce que je fais. J’aime être seule parmi les vignes, écouter les oiseaux chanter, écouter siffler le vent, regarder les nuages glisser, voir les coccinelles s’accoupler (🤣) et beaucoup d’autres choses. Des choses simples qui me font sentir vivante.

Quoiqu’il en soit, cette aventure n’aurait pu démarrer sans le soutien indéfectible de ma famille : mon mari (bah oui il a bien du mérite de me supporter depuis tant d’années de vie commune 🤣), mes parents qui sont toujours enjoués en écoutant mes blabla, mes soeurs qui ont vite compris que mon bien-être en dépendait, et mes beaux parents qui ont toujours une ou deux questions et qui m’encouragent.

Quoiqu'il en soit, cette aventure n'aurait pas pu se faire sans le soutien indéfectible de ma famille : mon super mari (bah oui, il a du mérite de me supporter après tant d'années de vie commune), mes parents toujours enjoués à l'écoute de mes blabla, mes soeurs qui ont vite compris que mon bien-être en dépendait, et mes beaux-parents qui me posent toujours une ou deux questions et m'encouragent.

Ma philosophie

Les gens me demandent parfois « quel vin veux-tu faire ? ». La première fois j’ai répondu « oh moi, je ne suis qu’une toute petite vigneronne qui fera un petit vin », la vigneronne avec qui j’échangeais ce jour là m’a rétorqué « non Lan, tu feras un grand vin, vise haut ! »
Je veux juste produire un vin qui me corresponde, qui me plaise avant tout, un grand vin !.

Je ne cherche pas à produire beaucoup mais à offrir un vin de qualité : mon objectif est de travailler 3 à 4 hectares maximum car je travaille seule. Je travaille sans tracteur 🚜 avec un minimum d’investissement dans le matériel agricole qui coûte très cher. Je veux laisser la vigne s’exprimer seule, en intervenant le moins possible que ce soit en viticulture ou en oenologie.

J’ai commencé la conversion en agriculture biologique des parcelles dès cette première année 2021 : pas de travail au sol, un effeuillage (suppression des feuilles) et un tressage des rameaux, un enherbement sauvage partiel qui sera remplacé par des futurs semis que j’aurais préalablement choisi en fonction de la structure du sol et de l’objectif attendu.
Le labour, je vais devoir le pratiquer au moins une fois pour décompacter le sol. Pour le côté pratique, je pense devoir utiliser un treuil et une charrue vigneronne. Mais j’aimerais à terme travailler le sol avec un âne ou une mule. Pourquoi pas un cheval me direz-vous. Et bien je suis petite et le cheval de trait est de grande envergure. L’âne ou la mule, de plus petit gabarit passera plus facilement entre les rangs qui sont de 80 cm à 110 cm de largeur. Attention, mon labour n’en n’est pas vraiment un : juste griffer le sol 1 fois par an pour permettre à mes futurs semis d’automne de prendre. La mise en place de couverts végétaux temporaires devrait apporter de la biodiversité et de la matière organique qui manquent tant au sol. Les couverts seront détruits en mai après leur floraison pour en faire un paillage, le but est de ne jamais laisser le sol nu. Puis ils seront semés à nouveau à l’automne, et ainsi de suite.

La protection de mon vignoble passe obligatoirement par la phytothérapie. J’ai déjà commencé à pulvériser de la prêle, de la 500, de la valériane et du petit lait de chèvre dans les vignes. Chacune de ces préparations a un but spécifique, qu’il soit préventif ou curatif. Qu’il faut pulvériser au bon moment selon les besoins de la plante. Non, je ne suis pas en biodynamie, mais je m’y intéresse. Périgée, apogée, lune ascendante, lune descendante..j’essaie d’appliquer ces principes le mieux possible. Quant aux produits phytosanitaires tels que le soufre et la bouillie bordelaise, je n’ai pas encore le choix pour le moment. Les parcelles n’ont eu que du chimique jusqu’à maintenant et il ne faut pas brusquer le sol. Le regénérer demande du temps et j’espère que d’ici quelques années je puisse bannir tout apport de cuivre. C’est un projet ambitieux mais j’y tiens. Je déteste pulvériser ces produits qui sentent mauvais (l’odeur du soufre est tenace) et les pulvériser est très fastidieux car je porte les équipements de protection individuel en totalité : demi-masque avec filtre, lunettes de protection, combinaison et gants. Et lorsqu’il fait plus de 15°, je subis une séance de sauna ! Ajouter à cela la pente de 25% du Calvaire et imaginez le…calvaire 🤣

(Auteur : Levan Totosashvi)

Je n’ai pas encore de cuvage, donc je ne vinifierais pas la récolte de cette année. J’ai cependant déjà quelques idées au niveau du chai, notamment deux cuves en béton pour la macération semi-carbonique (à la beaujolaise), des cuves ovoïdes en polyéthylène ou jarres en grès pour l’élevage du vin, et surtout des qvevri qui sont dans de grandes jarres de terre cuite géorgiennes permettant la macération et l’élevage. Je veux limiter un maximum les intrants dans la vinification et les qvevris m’ont apparus comme une bonne solution. Mais cela suppose aussi que je ne pourrais pas les utiliser avant 3 à 4 ans, le temps que le sol soit regénéré et les vignes devenues vraiment « bio ». Car malheureusement la terre des jarres ou qvevris absorbent tout et donc les résidus de produits chimiques aussi.

Je souhaite également proposer un vin issu d’un cépage oublié qui ne sera pas le gamay. Un cépage typique d’autrefois qui proviendra d’une autre région car dans le Beaujolais il n’y a jamais eu que le Gamay 😅. Je ne sais pas encore lequel et mon apprentissage ampélographique est très récent. Pourquoi ? Pour 2 raisons : les méthodes de vinification et de conduite du vignoble ont changé et certains cépages anciens ont été abandonnés parce qu’ils ne produisaient pas assez ; et les changements climatiques sont devenus soudains et extrêmes ces dernières années obligeant les vignerons à s’adapter.

Mes vignes…en live

Le vignoble beaujolais est un très vieux vignoble. Il existe de nombreux site internet très bien fourni sur ce thème, je ne m’étends donc pas dessus. Il faut savoir qu’il est caractérisé par 2 cépages : le gamay noir à jus blanc pour le beaujolais rouge et le chardonnay pour le beaujolais blanc. Il existe 12 appellations dans le Beaujolais : Beaujolais, Beaujolais villages et 10 crus (Brouilly, Côtes de Brouilly, Chénas, Chiroubles, Fleurie, Juliénas, Morgon, Moulin-à-Vent, Régnié et St Amour).

Actuellement je travaille sur 5 parcelles : 2 parcelles d’une surface globale de 27 ares à Romanèche Thorins en appellation Moulin à Vent et 3 parcelles situées à Blacé, dans le sud du Beaujolais, à une altitude de près de 300 mètres, en appellation Beaujolais et Beaujolais Villages pour une superficie d’environ 1,10 hectares (11000 m2).

La première parcelle de Blacé nommée « le Chêne » culmine à près de 350 mètres d’altitude.

La seconde parcelle de Blacé nommée « la Traverse » est juste en dessous du « Chêne » et présente une pente de 5 à 10%.

La troisième parcelle de Blacé nommée « le Calvaire » est plus basse et présente une pente de 20 à 25%.

La taille des ceps est celle du gobelet et fait partie de la particularité du Beaujolais. Le cep présente 4 à 5 « bras » (des gros bouts de bois) sur lesquels 2 « rameaux » (bouts de bois plus fins) poussent qui porteront les grappes de raisin 🍇 Les ceps sont relativement bas sur mes parcelles, c’est assez dur d’y travailler lorsque l’on est grand. Le dos souffre pendant la période de taille, des travaux en vert et les vendanges. J’ai la chance d’être petite 🤣 Les parcelles sont en partie palissées (je les ai récupérées ainsi), le sol n’a jamais été travaillé et la conduite du vignoble était conventionnelle (désherbage chimique) jusqu’à maintenant.

Vous pouvez lire l’article sur « ma philosophie » pour découvrir ma conduite du vignoble. Un article sera édité après les vendanges pour vous parler plus précisément de mon sol.